Innovations technologiques au service de l’expérience client

Innovations technologiques au service de l’expérience client

Introduction

La période inédite marquée par la crise sanitaire et les mesures successives de confinement de ces deux dernières années a accentué des tendances déjà perceptibles qui remodèlent le comportement des investisseurs (particuliers et institutionnels). En effet, ces derniers :

  • Recherchent de meilleurs rendements et des frais de gestion compétitifs[1] 
  • Recherchent des interactions plus fluides, quasiment en temps réel, avec plus de personnalisation
  • Souhaitent donner du sens dans le choix de leur épargne qu’ils veulent plus en adéquation avec les Objectifs de Développement Durable (ODD).

Les sociétés de gestion d’actifs ont ainsi deux principaux leviers à actionner pour ajuster leur modèle opérationnel et d’activité :

  • La stratégie marque et produits : faire en sorte que la marque soit perçue comme véhiculant des valeurs et une « mission » en accord avec une offre produits plus « responsables et durables » pour la société
  • La technologie au service de la stratégie de distribution : améliorer l’efficacité de la distribution dans l’ensemble des activités[2], c’est-à-dire à l’échelle de l’entreprise visant à transformer toute la chaîne de la distribution

Pour ce faire, le secteur de la gestion d’actifs doit accélérer sa révolution technologique :

  • En mettant en place des solutions innovantes et efficaces pour répondre aux attentes des investisseurs en matière d’hyperpersonnalisation de la relation client et de développement d’un parcours client sans couture, à forte valeur ajoutée. L’utilisation de nouvelles technologies comme l’intelligence artificielle (Machine Learning, NLP) permettront de répondre à ces enjeux d’hyperpersonnalisation et d’amélioration du parcours client, qui restent fortement réglementés (MIF2, DDA)
  • En explorant de nouvelles technologies comme la Blockchain DLT, prometteuses pour la gestion du passif

Quels sont les enjeux ?

Les principaux enjeux des sociétés de gestion face aux innovations technologiques sont aujourd’hui multiples et concernent tout le parcours client.

A l’entrée en relation

« Retailisation » de l’activité, développement du B2C

Il y a deux aspects à prendre en considération :

  • D’une part, le client final est de plus en plus demandeur d’épargne, et manifeste une attente en matière de produits adaptés
  • D’autre part, les sociétés de gestion doivent s’organiser pour accéder et séduire directement le client final

Face à cet enjeu d’accès au client retail en direct, les sociétés de gestion – qu’elles soient entrepreneuriales ou filiales de groupes financiers – connaissent un nouveau type de concurrents extrêmement agressifs : les purs players Fintech et les GAFA. Ceux-ci innovent en étant orientés customer-centric, alors que les sociétés de gestion restent essentiellement product-centric[3].

Autonomisation du client

L’autonomisation peut être définie comme une nouvelle forme de « relation client » où la SGP met à disposition du client des outils, le plus souvent numériques, lui permettant d’agir seul en toute confiance sur quasiment 100% de son parcours. Les changements apportés peuvent conduire à une utilisation accrue des services financiers numériques, avec les objectifs suivants :

  • Renforcer la confiance des clients dans les services financiers numériques qu’ils utilisent
  • Encourager les clients à poursuivre l’utilisation des services dans la durée
  • Présenter de manière transparente les services que les gestionnaires s’engagent à fournir aux clients et les moyens qu’ils mettront en œuvre pour respecter leurs engagements
  • Fournir aux clients les moyens d’influer sur la qualité des rapports qu’ils entretiennent avec les prestataires de services et de faire état de leurs doléances, le cas échéant

Pour atteindre cet objectif, un effort de pédagogie et d’éducation est indispensable à destination des investisseurs. Les sociétés de gestion peuvent y contribuer car elles sont en mesure d’apporter une information neutre aux clients.

Digitalisation de la relation client

Avec l’essor des réseaux sociaux notamment, les clients s’attendent de plus en plus à des réponses immédiates : le client exige d’une marque ou entreprise qu’elle soit disponible en permanence. Selon une étude Salesforce, plus de 8 clients sur 10 développent un sentiment de fidélité vis-à-vis d’une marque lorsqu’ils obtiennent une réponse immédiate à leurs questions[4].

De telles pratiques axées sur les clients sont aussi apparues dans le domaine de la gestion d’actifs. De plus en plus de clients exigent de leurs conseillers financiers les mêmes services hautement personnalisés et taillés sur mesure via le digital. Il est donc impératif que les sociétés de gestion d’actifs rehaussent les services qu’elles proposent pour maintenir des relations solides et engageantes avec leurs clients et utilisent les mêmes canaux de dialogue avec les clients (développement d’un marketing digital).

Solutions d’investissement

Hyper personnalisation de la relation client : vers une distribution sur-mesure

L’incidence que l’hyper personnalisation peut avoir sur la génération de revenus, l’obtention et la fidélisation des clients incite les entreprises à précipiter son adoption. Poussant encore plus loin les niveaux de recommandations personnalisées atteints par Netflix, Spotify et Amazon, Starbucks a créé un programme de récompenses qui lui permet d’offrir des suggestions hyper personnalisées. En combinant les données de localisation et l’historique d’achat d’un utilisateur, ce programme peut offrir des promotions sur mesure[5].

A l’instar de ce qui se passe dans les autres industries « retail », les sociétés de gestion d’actifs doivent offrir les mêmes expériences personnalisées pour répondre aux nouvelles attentes des clients[6].

Cette personnalisation passe par l’industrialisation de l’individualisation pour le « mass market ». 80%[7] des sociétés de gestion d’actifs pensent que la personnalisation pour la clientèle « mass market » sera une stratégie importante pour les 5 années à venir. Celle-ci fera appel aux technologies IA pour être opérationnelle.

Vers des « offres d’allocations signifiantes » pour les clients

La marque va devenir un repère en termes de « valeurs » et de « mission ». Cela amènera les clients à se demander dans quelle mesure la société contribue de manière positive à la société. Ainsi, ils auront tendance à sanctionner les sociétés n’alignant pas leur communication avec les offres et services proposés. 97% des sociétés de gestion d’actifs perçoivent la marque comme un élément fortement différenciant[8].

Au-delà de ce nécessaire alignement, les investisseurs attendent des explications sur la composition de leur investissement. En quoi les actifs sélectionnés promeuvent-ils des objectifs environnementaux, sociétaux ou de bonne gouvernance ? Le rendement purement financier ne suffit plus à convaincre. Il devient alors essentiel de fournir un « fil narratif » explicatif convaincant, s’appuyant sur des données extra-financières fiables.

Innovations technologiques au service de l’expérience client

Données et Reporting

Une meilleure connaissance client qui influence le contenu du reporting

L’hyper personnalisation mentionnée supra doit se retrouver dans la communication et le reporting. Les informations remontées doivent correspondre aux préoccupations exprimées par le client lors de ses interactions avec la société de gestion d’actifs.

Une meilleure gestion des données, notamment de la donnée client

Afin de concrétiser cette personnalisation, la donnée est l’alpha et l’oméga de la démarche. Quelle société de gestion n’a pas passé du temps à prospecter des clients non intéressés par sa stratégie et ses offres alors qu’un minimum d’informations collectées et recoupées aurait conduit à ne pas solliciter ces prospects ? Qu’en est-il également des interactions de mauvaise qualité en raison d’informations différentes entre les différentes équipes de la SGP ? Ces situations montrent aux prospects et aux clients combien la SGP est désorganisée, entamant le capital de confiance vis-à-vis de la marque. Une organisation de la gestion de la donnée est dès lors essentielle (Voir la fiche : La donnée, combustible au cœur du réacteur d’une SGP). Pour simplifier, elle passe par une gestion structurée[9] :

  • Des données client : comprenant des informations d’historiques sur les transactions, de performance et d’appétit aux risques, critères d’achat/ventes…
  • Des données de portefeuilles : données sur la performance, les positions…
  • Des données marketing : comprenant les historiques ces entretiens, d’appels, de feedbacks…
  • Des données de tiers : comprenant des informations sur les données provenant des conservateurs
  • Des données provenant de bases de données de l’industrie : comprenant des données provenant d’autres SGP sur les performances, les flux de données, benchmark…

Que faire ?

De multiples leviers sont actionnables : changements et rationalisation technologiques à grande échelle, développement d’architectures data et modification des modèles opérationnels et business[10].

A l’entrée en relation

« Retailisation » de l’activité, développement du B2C

6 piliers pour une expérience client optimale dans la gestion d’actifs :

  • Personnalisation : avoir des attentions personnalisées pour créer un lien émotionnel avec le client
  • Attentes : gérer, satisfaire et dépasser les attentes des clients
  • Effort / Temps : minimiser l’effort du client et créer des processus sans friction
  • Intégrité : être digne de confiance, susciter la confiance
  • Résolution : transformer une mauvaise expérience client en une excellente expérience
  • Empathie : comprendre la situation du client pour établir une relation durable

Parallèlement, il convient pour les acteurs de développer des dispositifs B2B2C et B2C2B :

  • Du E-learning par la gamification pour les conseillers clientèle de distributeurs qui sont des dispositifs aidant à la compréhension des produits. BNP Investment Partner a par exemple ouvert à l’utilisateur final son application Investor Challenge, initialement destinée aux conseillers clientèle du retail
  • Un service de « test and learn » pour concurrencer certaines fintechs. C’est par exemple le cas du Parvest Club, qui offre la possibilité de construire et de tester son portefeuille dans le passé et le futur pour les banquiers privés et des CGPI, afin qu’ils puissent partager ces simulations en présence de leurs clients
  • Idem avec la plateforme Asset Studio[11] de Natixis Investment Managers. Développée en partenariat avec sept FinTechs, Asset Studio marque une étape importante dans la stratégie d’innovation digitale et d’excellence client de Natixis IM. Cette plateforme offre aux investisseurs un accès unique à une multitude de fonctionnalités en matière de construction, d’optimisation et d’analyse (notamment ESG) de portefeuilles. Institutionnels, conseillers en gestion de patrimoine ou encore banques privées ont accès à un outil sur-mesure, interactif et sécurisé pour faciliter leur parcours d’investissement
  • Des programmes de « feed » où les clients gagnent en autonomie et accèdent à tout moment à l’ensemble des actualités des fonds du groupe, à l’actualité financière, aux publications et podcasts, ainsi qu’aux points de vue de gérants spécialistes comme le font Franklin Templeton ou Invesco.
  • Des plateformes d’échanges et de lobbying entre intermédiaires de l’asset management banquiers privés, CGPI, institutionnels qui peuvent être relayés dans des groupes privés sur les réseaux sociaux. Ainsi, ils peuvent créer une relation de partage avec leur communauté et mettre en place un outil « d’écoute » et de communication efficace (échanges directs, recueil d’avis et de réactions)

Enfin, n’oublions pas le volet réglementaire et mentionnons que « les autorités (ACPR, AMF) invitent les professionnels à améliorer les parcours de souscription, correspondant aux différentes étapes par lesquelles passe un client sur internet jusqu’à la finalisation de son achat, afin de garantir un consentement éclairé́ de sa part »[12]. Les professionnels sont tenus de respecter les textes en vigueur, principalement MIF 2 et DDA.

Autonomisation du client et digitalisation du parcours

Le recours aux robo-advisors[13], plus développés dans le monde anglo-saxon, est un des dispositifs possibles pour contribuer à cette autonomisation.

Le « selfcare » (ou portail en self-service) en est un autre. On y retrouve les FAQ, FAQ dynamiques (associés à un moteur de recherche interne), les assistants conversationnels (Chatbot, Voicebot, Callbot…), ainsi que les boites d’aides spécifiques. Les solutions selfcare proposent un accès simple à des réponses immédiates. Placés aux moments déterminants des parcours, ils fluidifient l’expérience client :

  • Que ce soit au moment de la décision d’investissement
  • Ou plus tard dans le parcours, pour consulter des informations extra financières par exemple

Aussi, pour prendre le virage technologique de la « retailisation » de la gestion d’actifs, il convient d’investir en moyens marketing, marketing digital et en formation des gestionnaires et conseillers pour accompagner l’autonomisation des investisseurs :

  • développer une communication poussée sur les services proposés
  • permettre aux gestionnaires et conseillers d’expliquer en détails les services proposés

Solutions d’investissement

Hyper personnalisation de la relation client : vers une distribution sur-mesure

L’objectif est d’intégrer aux analyses les particularités de chaque client et d’aller au-delà des discussions impersonnelles. Ainsi, l’idée est d’avoir une discussion qui rehausse le lien de confiance et consolide la relation en s’appuyant sur des aspects plus détaillés de la vie du client : par exemple son état de santé et sa situation professionnelle ainsi que ses autres intérêts personnels et professionnels[14].

Dans un sondage mené auprès de cadres de sociétés de gestion du patrimoine par Temenos et Forbes Insights en juin 2019, 82% des répondants ont affirmé que les entreprises qui personnalisent davantage leurs produits sont celles qui réussiront [15].

Cela requiert une réorientation des budgets et des moyens vers le marketing et l’utilisation de ces données collectées dans les outils de sélection de produits / offres adaptés.

Côté distributeur, ce dernier doit proposer le bon produit au bon client. Soumis à MIF 2, il doit se doter de dispositifs pour obtenir les renseignements utiles relatifs aux produits financiers proposés. Il doit en comprendre les caractéristiques et évaluer la compatibilité de l’instrument financier avec les besoins du client. Il doit aussi réviser périodiquement le marché cible. Le distributeur doit informer le producteur sur l’état de la commercialisation des produits financiers. Plus récemment, l’intégration des « préférences de durabilité » – effective à partir d’août 2022 – ajoute une couche au profiling client dans l’évaluation de la proportion d’investissement durable qu’il souhaite.

Des « offres d’allocations signifiantes », pour les clients

Les nouvelles technologies[16] facilitent l’exploitation des données et l’arrivée du « marketing augmenté ». Elles permettent de produire 4 types d’analyse[17] :

  • Descriptive : profilage des clients…
  • Prédictive : identification d’attributs permettant de classer les prospects les plus susceptibles de devenir des clients, et ciblage du « prochain meilleur client » à solliciter…
  • Cognitive : transformation de données non structurées en une information signifiante sur laquelle la SGP ou le distributeur peut agir avec le client, analyse de résultats de recherche ou d’informations émergentes pour orienter les propositions d’investissement…
  • Prescriptive : identification d’une séquence d’actions pour s’assurer de la réalisation d’un résultat comme les actions successives permettant de convaincre un client d’acheter un fonds ou d’accepter une entrevue

Ces technologies permettent de traiter la donnée extra-financière en grande quantité. Ce faisant, l’intérêt est double[18] :

Quantitatif

Gain de temps : les gestionnaires de portefeuille et les analystes peuvent désormais tirer parti d’outils s’appuyant sur du NLP et OCR pour simplifier leur tâche. Ces outils d’aide aux gestionnaires leur permettent de devenir des « gérants augmentés » : ces derniers gagnent en productivité grâce à l’analyse des données filtrées, agrégées, nettoyées pour ensuite prendre une décision d’investissement éclairée.

De leur côté, les équipes commerciales disposent d’une vue 360° des clients qui leur permet de proposer les meilleurs produits, au bon moment. On appelle cette démarche « next step best action »[19]: le commercial accompagne ses clients à chaque prise de contact pour ne pas leur faire perdre de temps. De plus, le gérant augmenté qui utilise l’analyse prédictive est capable d’anticiper les besoins des clients avant même qu’ils ne les aient formulés.

Qualitatif

Élimination de biais cognitifs dans la sélection de l’information et d’une plus grande exhaustivité des critères analysés : un humain, dans son processus de recherche d’investissement, devra irrémédiablement filtrer les informations, et sélectionner celles qui, à ses yeux, sont les plus pertinentes. Pourtant, ce filtre n’est pas sans biais. Le recours à un algorithme pour l’assister dans cette tâche permet donc aussi d’améliorer qualitativement le processus.

En effet, le machine learning permet au conseiller de tester différentes stratégies d’investissement avant de proposer la plus adaptée à son client. Dès lors, ceci participera à la création d’un environnement collaboratif autour de multiples idées d’investissement.

Contribution à la « narratisation » de l’investissement : la collecte et analyse d’informations sur les intérêts du prospect ou client permettent d’orienter le discours à sa destination, notamment en mettant en avant l’impact de l’investissement proposé. « Qu’est-ce que je finance ? », « Comment l’impact ODD du portefeuille évolue-t-il ?… Ce « fil narratif » continu (qui peut être évolutif) matérialise l’attention porté aux préoccupations du client et fortifie la qualité de la relation dans le temps.

Les produits dits « direct indexing » ou d’indices de marché sur mesure sont des exemples de produits permettant l’hyper personnalisation en s’appuyant sur les nouvelles technologies qui simplifient considérablement le processus de leur élaboration[20].

Il est également possible d’avoir recours au RPA[21] ou d’utiliser des robots pour automatiser et personnaliser le conseil financier, par exemple dans le cadre de plans d’épargne entreprise. L’intelligence artificielle peut également être utilisée pour réaliser des propositions d’arbitrage.

L’idée pour les gestionnaires d’actifs est donc de réussir à trouver un équilibre reposant sur le meilleur des deux mondes : une automatisation des tâches à faible valeur ajoutée et un recentrage sur l’humain.

Données et Reporting

La quête de la personnalisation évoquée supra, nécessite une gestion de la donnée transversale ainsi qu’une hyper catégorisation des clients. Nous pouvons citer quelques services rendus possibles par les nouvelles technologies pour une expérience client augmentée [22] :

Pour la SGP :

  • Réorientation d’offre promotionnelle, de contenu informationnel ou de « Thought Leadership » personnalisé utilisant le courriel, le mobile, ou le portail client
  • Courriel ciblé selon les centres d’intérêts du client
  • Adéquation des newsletters, études et analyses avec les attentes client contribuant à solidifier l’acquisition et la fidélité
  • Vues communes sur des analyses risques, de performance et d’allocation des portefeuilles entre équipes marketing, ventes…
  • Micro-segmentation s’appuyant sur les comportements client
  • Prochain « meilleur produit » à proposer au client

Pour le client :

  • Accès à l’information de son compte en temps réel
  • Vues sur des analyses risques et de performance de son portefeuille
  • Outil d’optimisation d’allocation (conseil pour modifier la composition du portefeuille)
  • Reporting interactif

Comment ? Quelles initiatives ?

Pour rationaliser les coûts de distribution tout en personnalisant et en enrichissant l’offre de produits et services existants, les sociétés de gestion d’actifs doivent moderniser leur chaîne de valeur. Ceci passe par :

  • Une meilleure connaissance et gestion de la data client
  • La personnalisation du parcours client
  • La digitalisation de la relation client[23]
  • L’utilisation d’autres modes de distribution

Une meilleure connaissance et gestion de la donnée client

Organisation des référentiels autour de la donnée client

Pour servir l’ensemble des services mentionnés supra, il est impératif de disposer d’une architecture des données structurée autour des données clients, des données opérationnelles et des entreprises tiers avec lesquelles la SGP interagit. La barrière principale empêchant une prospection efficace ou le maintien d’une relation continue avec un client informé de manière qualitative, est la fragmentation des données dans des outils et applicatifs en silo.

Afin d’être « consommables » par ces technologies, la donnée doit être exploitable (Voir Fiche : La donnée, combustible au cœur du réacteur d’une SGP). Au-delà de cet impératif, une réflexion est à mener par les SGP, si elles ne l’ont pas déjà entamée, pour faire évoluer leur modèle opérationnel afin de :

  • Mettre en place une gouvernance des données
  • « APIser[24] » leurs flux de données
  • Mettre en œuvre une infrastructure « Cloud »

Personnalisation du parcours client

Premier robo-advisor à proposer ses services en France en 2015, Yomoni dépoussière l’assurance-vie et le PEA. Il s’agit d’une offre de gestion pilotée, aussi appelée gestion déléguée. La gestion Yomoni s’appuie à la fois sur la technologie, mais aussi sur le comité d’investissement Yomoni composé de plusieurs professionnels expérimentés.

Concrètement, l’investissement est alloué, piloté et arbitré sans intervention de la part du client qui reçoit un reporting complet sur son espace client. Cela dit, le client garde la main : il peut modifier son profil de risque (plus défensif ou plus dynamique) à tout moment pour que le robo-advisor s’adapte avec une nouvelle allocation avec le meilleur couple rendement/risque.

Yomoni a pour ambition d’offrir à ses clients une offre personnalisée avec de faibles frais de gestion, des tarifs attractifs et transparents. Tout le processus est digitalisé, la souscription comme la gestion. Le client peut tout gérer en ligne.

Autre exemple : Active Asset Allocation conçoit des solutions d’investissement sur mesure basées sur des objectifs et la gestion des risques. Ces solutions sont utilisées par les investisseurs institutionnels pour leur compte propre et par les assureurs pour des gestions pilotées ou conseillées. AAA propose aux conseillers financiers à travers son robo-advisor qui leur est dédié (RAFA), des outils de suivi, de prise de décision et d’individualisation des conseils. Avec les outils de AAA, le conseiller financier peut :

  • Embarquer ses clients
  • Créer des projets de vie
  • Faire le profilage de risque
  • Optimiser les résultats possibles de ses projets en gestion libre ou pilotée
  • Proposer une allocation individualisée
  • Vendre et suivre les produits d’épargne
  • Suivre l’évolution des investissements de ses clients

Digitalisation du parcours client

De nombreuses solutions existent pour numériser tout ou partie du parcours client. Dans la phase d’entrée en relation, citons la start-up Neuroprofiler : créée en 2016, elle propose un questionnaire qui permet aux acteurs des services financiers d’établir le profil comportemental des clients. Elle propose différentes solutions comme la solution MiFID profiler, qui permet à ses clients d’améliorer leur conformité à MiFID II, de construire des questionnaires « gamifiés » préférés par 80% des clients par comparaison aux questionnaires traditionnels, ou encore de réduire le taux d’abandon lors de l’entrée en relation client MiFID II.

En matière de digitalisation du parcours de souscription :

  • Harvest Groupe, créée en 1989, propose des solutions de souscriptions digitalisées à destination des sociétés de gestion et professionnels de la gestion de patrimoine
  • Moniwan est un distributeur de produits d’épargne en ligne, spécialiste des solutions d’investissement immobilières, proposant des offres SCPI (en direct ou via assurance-vie) ou encore viticoles. Moniwan.fr propose un parcours en ligne, pratique, plus rapide et sécurisé. Avec une solution 100% digitale et des conseillers si besoin, Moniwan.fr permet de gérer son épargne n’importe où et n’importe quand. Moniwan.fr a été lancé en 2016 avec pour promesse de démocratiser l’épargne. Loin des termes techniques trop compliqués pour un non spécialiste de l’épargne, Moniwan.fr a fait le choix de la transparence, de la simplicité et de la pédagogie
  • En matière d’automatisation du contenu, SEISMIC, crée des livrets de présentation (« pitch books »), des fiches descriptives (« fact sheets »), des revues clients (« client reviews ») et des appels d’offres en quelques heures au lieu de plusieurs semaines en automatisant les points clés du processus d’élaboration de ces documents. L’entreprise propose également des contenus aux conseillers clientèle à partir d’une plateforme unique

L’utilisation d’autres modes de distribution

La technologie Blockchain / DLT (Voir la fiche : Impacts de la blockchain dans les process métiers) pourrait bien révolutionner les modes de distribution[25]. Elle permettrait de gagner en transparence et de faciliter les échanges :

  • Services moins coûteux : rationalisation des activités, chaîne de valeur optimisée. La tendance de réduction des coûts reste à confirmer à plus grande échelle
  • Échanges facilités : partage de données en temps réel (via un registre distribué à l’ensemble des participants au réseau) ainsi que l’optimisation et l’automatisation des processus. Elles permettent également de réduire le nombre de contreparties qui interviennent dans la chaîne de valeurs : les investisseurs et les sociétés de gestion interagissent directement ensemble (peer-to-peer), sans intermédiaire
  • Transparence : les différents participants peuvent accéder aux mêmes informations en même temps. L’historique des transactions sera stocké de façon permanente, immuable et horodaté dans la blockchain

Citons à titre d’exemple, les solutions proposées par FundsDLT et IZNES.

De même, Particeep propose aux banques, aux assureurs, aux sociétés de gestion et à leurs réseaux de distribution des solutions clés en main pour distribuer en ligne leurs produits financiers en moins d’un mois et sans développement informatique.

Le déplacement de la communication visant à considérer une partie des produits d’investissements offerts par les SGP comme des produits de consommation courante, plutôt que des produits d’épargne, légitime encore plus l’arrivée des GAFAM. C’est le cas d’Amazon[26] qui a noué un partenariat avec Aviva pour distribuer des produits d’assurance.

Innovations technologiques au service de l’expérience client

Et l’ESG dans tout ça ?

Le renouvellement de la base des investisseurs avec l’arrivée des jeunes générations, plus sensibles aux enjeux de transition climatique, modifier la manière de consommer les produits d’investissements, en termes de canaux de distribution mais aussi de contenu. Ces générations recherchent non seulement une performance financière mais également une performance environnementale et sociétale[27]

Les réglementations européennes (MIF2, DDA) instaurent un cadre d’incitation pour que les acteurs financiers, parmi lesquelles les sociétés de gestion jouent un rôle moteur dans la construction d’une économie plus durable et responsable. Elles doivent ainsi prendre en compte les préférences de durabilité des clients dans le conseil en investissement et en matière d’assurance-vie.

En termes d’offres / services cela représente une opportunité pour les SGP de donner les moyens aux clients investisseurs de savoir à quels enjeux répond les actifs composant leurs portefeuilles.

Le coin de la start-up et de l’innovation

  • Neuroprofiler : créé en 2016, Neuroprofiler aide les conseillers financiers à mieux évaluer le profil de risque de leurs clients à des fins commerciales et réglementaires. Elle propose des questionnaires en ligne, conformes MiFID II et « gamifiés » s’appuyant sur la finance comportementale
  • Yomoni : première société de gestion de type robo-advisor en France qui a obtenu en 2015 un agrément de Société de Gestion de Portefeuille (SGP) par l’Autorité des Marchés Financiers (AMF). C’est toujours le seul robo-advisor Français agréé
  • RIFT : application mobile qui scanne l’impact sociétal et environnemental des comptes courants, livrets A et assurances-vie pour permettre de façonner une épargne à l’image des investisseurs. Il répond à 3 interrogations : où est placé mon argent ? mon épargne impacte-elle l’environnement ? comment reprendre le contrôle de mes données ?
  • SMAT.IO : mise en relation des distributeurs de produits financiers et des gérants de fortune ou de petites banques recherchant des opportunités de placements non cotés en bourse, comme l’immobilier ou le private equity[28]
  • FundsDLT : société luxembourgeoise détenue par Clearstream, Crédit Suisse Asset Management, la Bourse de Luxembourg et Natixis Investment Managers. Créée en 2020, elle propose une offre de distribution de fonds en utilisant la blockchain pour automatiser et mutualiser les processus de manière sécurisée. La plateforme permet à un écosystème coopératif d’acteurs de la chaîne de distribution d’échanger des données en temps réel et de supprimer les activités redondantes
  • IZNES : plateforme pan-européenne d’investissement de parts d’OPC et de tenue de registre en Blockchain compatible avec l’intégralité des canaux de distribution. IZNES assure :
    • La réception et la transmission des ordres des investisseurs
    • Les tâches de centralisation et de tenue de compte émission pour le compte des sociétés de gestion. Le modèle d’IZNES permet ainsi d’éliminer le risque de contrepartie financière, les actifs étant directement inscrits au registre des fonds
  • MySmartRFP : spécialiste des appels d’offres dans la gestion d’actifs créée en 2015. Propose entre autres la plateforme PRISM (plateforme de Recherche Institutionnelle – Solutions et Mandats), qui permet à un donneur d’ordres d’organiser un Appel d’Offres à partir de modèles préexistants ou sur mesure directement en ligne. Elle facilite et accélère les réponses également en ligne et permet un dépouillement algorithmique instantané. Elle offre également une fiche de retour d’expérience à tous les participants, dans chaque secteur du questionnaire d’appel d’offres (Risques, performance, prix, structure, etc.)

Conclusion

Les sociétés de gestion d’actifs doivent impérativement placer les innovations technologiques au centre de leur stratégie de distribution pour faire face aux nouvelles attentes des clients. Les services-conseils hautement personnalisés seront bientôt le seuil minimal de valeur auquel s’attendent les clients. Ces derniers exigent de plus en plus que leur conseiller ait une meilleure compréhension de leur situation financière et personnelle et leur fasse des recommandations adaptées à leurs préférences et à leurs objectifs. C’est pourquoi les sociétés de gestion d’actifs doivent investir dès maintenant dans les initiatives fondées sur les données, l’analytique et l’IA qui les aideront à offrir les conseils et le suivi ciblés qui caractérisent les expériences hyper personnalisées.

Ce qu’il faut retenir

Marquées par les confinements successifs, les deux dernières années ont remodelé le comportement des investisseurs (particuliers et institutionnels) qui recherchent de meilleurs rendements, des interactions plus fluides et souhaitent donner du sens à leur épargne. Les acteurs du secteur de la gestion d’actifs doivent alors accélérer leur révolution technologique pour ajuster leur modèle opérationnel et d’activité, via le développement de solutions innovantes et l’exploration de nouvelles technologies comme la Blockchain DLT.